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Fin octobre 2023, Barbara POMPILI, ancienne ministre de la Transition écologique qui a été missionnée en mars 2023 dans le cadre de l’application des ZFE, a remis au Gouvernement son rapport intitulé « Acceptabilité des zones à faibles émissions – Les enseignements à tirer de l’expérience des pays européens ».

Rappelons que les Zones à Faibles Emissions (ZFE) consistent à limiter la circulation des véhicules les plus polluants afin d’améliorer la qualité de l’air, au bénéfice de la santé publique. En 2021, dans le cadre de la loi « Climat & Résilience », cette mesure a été étendue à l’ensemble des agglomérations de plus de 150 000 habitants. En juillet 2023, le ministère de la Transition écologique a assoupli le principe pour les agglomérations où les seuils de pollution ne sont pas dépassés.

Un sondage Ifop réalisé en juin 2023 indiquait que les Français, bien que de plus en plus inquiets du réchauffement climatique, avaient un avis partagé sur les ZFE.

Expériences européennes en matière de ZFE

Une analyse a été conduite des expériences des ZFE dans des pays européens où la mesure concerne à la fois les poids lourds et les véhicules des particuliers : le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Belgique, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne. L’objectif était de trouver des leviers d’acceptabilité des ZFE en France.

Le rapport souligne une mise en œuvre réussie et acceptée des ZFE dans ces pays. Les ZFE se révèlent être des outils efficaces pour améliorer la qualité de l’air dans les villes. A Londres par exemple, dans la zone à très faibles émissions (ULEZ) la concentration des émissions d’oxydes d’azote (NOx) a diminué de 23%.

Des recommandations pour les ZFE en France

Les 13 recommandations pour une application efficace des ZFE en France :

  1. Rendre plus efficace le dispositif Crit’air : adapter la catégorie Crit’air 2, qui comprend les véhicules diesel Euro 5 et Euro 6, afin de distinguer les véhicules diesel Euro 6b et au-delà, dont les émissions de NOx sont plus faibles.
  2. Permettre aux ménages et aux entreprises de se préparer aux évolutions à venir : lorsqu’une évolution des exigences Crit’air doit intervenir en plusieurs étapes, annoncer le calendrier à l’avance.
  3. Optimiser le périmètre des ZFE : permettre de déroger à l’obligation portant sur la proportion minimale de la population incluse dans le périmètre de la ZFE, s’il apparaît que cette obligation peut conduire à des solutions non optimales.
  4. Mettre en place des dérogations sans compromettre les objectifs : utiliser pendant quelques mois le dispositif de contrôle sanction à des fins d’information et autoriser à titre temporaire l’accès des véhicules non conformes pendant quelques jours par an.
  5. Harmoniser le cadre des ZFE : établir en particulier un cadre national de dérogations, à adapter par les territoires lorsque leurs spécificités le justifient.
  6. Anticiper : étudier les mesures à prendre dans la perspective d’une évolution de la réglementation européenne imposant des valeurs limites sensiblement plus basses à respecter pour 2030.
  7. Offrir des alternatives à la voiture : accompagner le projet de ZFE d’une politique de développement des transports publics, du vélo, de la mobilité partagée et des parkings-relais ainsi que d’une politique pour la logistique urbaine.
  8. Renforcer les aides sur les zones prioritaires : remettre à plat le dispositif global d’aides pour permettre une action renforcée sur les territoires en dépassement des valeurs limites et sur leur périphérie, en assurant la complémentarité des aides de l’Etat et des collectivités ; dans ce cadre, augmenter le montant de la prime à la conversion pour les entreprises installées à proximité du périmètre et intervenant dans une ZFE.
  9. Encourager les alternatives au véhicule particulier : créer au bénéfice des ménages renonçant à remplacer leur véhicule une aide financière pour l’achat d’un abonnement aux transports.
  10. Développer le rétrofit : encourager les solutions économiques de rétrofit, qu’il s’agisse de la transformation en véhicule électrique ou en hybride rechargeable.
  11. Mieux faire connaître les ZFE : lancer une campagne de communication au niveau national pour expliquer les enjeux des ZFE.
  12. Faciliter l’accès à l’information et aux aides : mettre en place un portail d’information unique, incluant un guichet unique pour la gestion des aides, et un service de conseil en mobilité pour les ménages et une assistance personnalisée pour les entreprises.
  13. Finaliser sans délai le cahier des charges de l’appel d’offres relatif au contrôle sanction automatisé et mener ensuite avec diligence la procédure d’appel d’offres.

Les conclusions du Rapport B. Pompili

Parmi ces recommandations, le rapport explique que l’information de la population est essentielle pour montrer que la mise en place des ZFE est utile, compte tenu de l’impact de la qualité de l’air sur la santé. Les particuliers et entreprises ne doivent pas se sentir bloqués dans leur mobilité ni piégés, et un équilibre doit être trouvé entre efficacité et souplesse. « Des dérogations temporaires peuvent y contribuer ». Le document indique également que les entreprises concernées par plusieurs ZFE souhaitent une harmonisation des règles de circulation à l’échelle nationale.

En outre, la mission recommande un soutien financier renforcé dans les territoires dépassant les seuils de pollution. Elle propose par exemple l’augmentation du montant des primes d’aides à la conversion de l’État pour les entreprises à proximité des ZFE.

Le rapport Pompili conseille aussi de développer le rétrofit pour transformer les véhicules en hybride rechargeable ou en électrique. Les systèmes de contrôle s’avèrent par ailleurs fort utiles pour éviter le sentiment d’injustice de ceux qui appliquent la mesure par rapport aux autres.

Des propositions avaient déjà été formulées début 2023 dans le cadre d’une concertation nationale sur les ZFE. Deux rapports avaient été produits : un rapport parlementaire et un rapport issu de la concertation nationale. Notons que le rapport parlementaire soulignait l’importance de développer les plateformes logistiques multimodales, permettant aux professionnels d’effectuer les derniers kilomètres en mode décarboné.

Dans la filière du végétal, l’Interprofession et les fédérations ont mené des actions d’influence auprès des pouvoirs publics pour obtenir des dérogations pour le transport de produits périssables. En outre, des questions relatives aux ZFE sont posées dans le cadre des études chiffres clés afin de mesurer les enjeux des ZFE pour les entreprises du végétal.