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L’analyse du contexte international de la filière horticole en février 2022 met en avant une poursuite de l’inflation, de la hausse du coût de l’énergie, des intrants et une montée des transactions en ligne à l’échelle internationale.
Résumé d’informations internationales semaines 5 à 8 et analyse :
La géopolitique influence forcément l’évolution de nos filières horticoles. Les conflits militaires près des frontières entre l’Europe de l’Ouest et la Russie ont déjà des conséquences directes et durables sur les prix de l’énergie et comme les producteurs ne sont pas sortis de l’hiver, l’incertitude pèse sur la capacité des exploitations à produire les quantités demandées.
D’autre part, l’indice de confiance des consommateurs baisse sérieusement, surtout dans les pays dont l’inflation dépasse l’évolution du pouvoir d’achat. En Allemagne et en France, l’équilibre entre inflation et pouvoir d’achat reste acceptable, mais au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, l’inflation de 3,5% dépasse la hausse des salaires qui n’est que de 2,2% ; le déséquilibre s’installe.
En 2021, la hausse moyenne du prix des fleurs et plantes en Europe est de 9,3%. Les consommateurs vont-ils favoriser l’épargne de précaution au détriment des autres dépenses ? De ce fait, l’amélioration de la demande de végétaux d’ornement constatée pendant la période pandémique va-t-elle tenir ?
La Saint-Valentin, première journée incontournable de l’année pour la demande de fleurs et plantes a servi de test, le commerce était sans restriction pandémique, une première depuis deux ans, et les prix au détail ont montré une forte hausse du fait des difficultés d’approvisionnement. Les marchés et les négociants ont réalisé des prouesses logistiques et réussi à assurer leurs approvisionnements.
Pour tous les maillons de la filière dans les pays, les ventes de cette année sont supérieures en valeur à celles de l’an passé, mais c’est principalement en raison de la hausse des prix.
Les fleurs coupées dans le monde affichent diverses tendances selon les continents. Les volumes et les prix des fleurs en provenance des pays d’Amérique latine vers les pays d’Amérique du Nord ont fortement augmenté. Les fleurs en provenance des pays d’Afrique de l’Ouest vers l’Europe ont augmenté en prix mais les volumes ont diminué. Les productions européennes pour l’Europe ont décru. Les quantités produites en Asie augmentent très rapidement, mais la demande des marchés intérieurs de ces pays augmente encore plus vite.
Les parts du marché mondial des fleurs coupées évoluent de manière significative depuis les épisodes de la Covid 19 : la part de la Hollande diminue progressivement mais sûrement, les productions d’Amérique centrale trouvent des voies directes vers les pays de l’Est de l’Europe et le Royaume-Uni à la suite du Brexit. Les productions du Kenya et d’Éthiopie cherchent aussi des alternatives au passage par les Pays-Bas.
Les problématiques issues de la crise de la Covid 19 s’installent.
La pénurie de main-d’œuvre provoque une évolution rapide des salaires, des conditions de travail, et de la législation. Aux Pays-Bas par exemple, l’on n’appelle plus travailleurs immigrés mais «salariés internationaux» ; les conditions évoluent en séparant le contrat de travail du contrat d’habitation et en revoyant à la hausse les conditions et primes de licenciement.
Le coût de l’énergie, notamment le gaz, n’est plus maîtrisable. Il oblige beaucoup d’exploitations à retarder leur planning de production en raison de la baisse des consignes de température et de la diminution de l’éclairage d’appoint. Au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Belgique, des exploitants ont préféré laisser leurs serres vides plutôt que de cultiver à perte, coincés entre les hausses hebdomadaires du prix de l’énergie et les négociations inflexibles de leurs plus gros acheteurs.
Les prix des intrants, engrais, substrats, emballages et les prix des services augmentent de manière hebdomadaire, obligeant les exploitants à revoir en permanence leurs conditions d’approvisionnement. Cette situation génère un nouveau type de relation entre clients et fournisseurs qui devrait favoriser une meilleure coordination verticale entre les entreprises.
Et la météo s’en mêle, provoquant des dégâts dans l’horticulture sous serre, rien qu’aux Pays-Bas 375 sinistres ont été enregistrés.
Commerce en ligne en b to c et b to b
Un autre grand défi gagne l’ensemble des entreprises : les transactions en ligne se généralisent de plus en plus à l’international, entre producteurs, places de marché, négociants, acteurs logistiques, enseignes et points de vente au détail et même directement vers les consommateurs. Cette évolution appelle une harmonisation des logiciels et un encodage facilement échangeable des données, ce qui est loin d’être le cas. Mais elle soulève aussi des questions incontournables de protection des données et des systèmes, ainsi que des questions majeures concernant la fiabilité des informations transmises.
Comment arriver à une fiabilité raisonnable, quand le stock des producteurs n’est pas actualisé en temps réel, que les commandes passées par les acheteurs ne sont pas non plus actualisées à l’instant T, et que, dans cette période de pénurie, les stocks disponibles des uns et des autres ne sont pas couplés entre eux ? Dans les mois à venir, cette question va prendre de plus en plus de place dans les échanges entre les différents acteurs de la filière horticole dans tous les pays.
Et pendant ce temps, la détérioration climatique prend de l’ampleur et l’environnement continue inéluctablement de se dégrader, renforçant les impressions d’incertitude dans l’opinion publique, et pousse les responsables politiques à prendre des mesures mais dont les effets sont mitigés. La concertation et coordination verticale entre les entreprises de nos filières devient incontournable sur ces grandes questions qui vont rapidement bousculer le commerce et les habitudes d’un passé révolu.
Brand WAGENAAR, le 28 février 2022.